Les deux bâtiments les plus imposants et les plus prestigieux à Port-au-Prince sont en passe d’être livrés aux groupes criminels. Ces deux tours, Digicel et Marriott, logées dans les hauteurs de Turgeau, dans une capitale délabrée, étaient devenues des attractions incontournables et transféraient un certain prestige par leur allure et leur apparat.
Au-delà de Delimart, du Collège Canado-Haïtien et de Natcom qui participent à cette ambiance infrastructurelle des plus modernes, les habitants de Pacot, de Debussy, de Canapé Vert et de Turgeau y trouvaient leur fierté mais surtout une raison de se sentir en securité contre les assauts des terroristes sans foi ni loi.
Car dans toute société où le bon sens et la cohérence prévalent, tous les moyens seraient mis en branle pour préserver de tels intérêts indispensables à la vie d’un pays, se disaient-ils.
Puisque, outre leur apparence grandiose, c’est quasiment tout le système de communication qui y est hébergé entre Digicel et Natcom et c’est aussi un certain plaisir que confère cette petite agglomération marquée du progrès et de la civilisation humaine tel que prônée par l’Occident.
Depuis quelque temps l’affolement est total et tous craignent que ces quartiers ne deviennent de nouveaux ‘territoires perdus’, de nouvelles victoires pour les crapules. Certains y croient même déjà et disent compter les jours avant que cela ne s’accomplisse à l’instar de mille et un autre cas d’exemples.
Donc la dégringolade poursuit son cours dévastateur et sordide. La désintégration sociale et économique d’Haïti ne semble pas vouloir s’arrêter. Et qu’est-ce qu’il y a d’autre à détruire sinon l’âme, l’histoire et l’identité haïtiennes? Nous connaissons et vivons chaque jour des atrocités auxquelles aucun être humain, fût-il blanc, jaune, roux, noir; fût-il Haïtien, ne devrait être soumis.
Alors cette course à la destruction voudra-t-elle épargner le peu d’infrastructures encore debout, rares symboles de la postmodernité dans une capitale dézinguée? Sinon, c’est que le plan continuera de s’exécuter. Et nous en connaissons la couleur.
Ce que nous ne savons pas, c’est quel en sera l’ultime crime? Quelle en sera la dernière couleur? Quelle sera la dernière danse ?

JJHaïti!