MIAMI, 21 Mai – Je dois comme le veut la coutume dire un mot de notre Didier parti le dimanche 18 mai écoulé, emporté par un fulgurant cancer du pancréas et qui est pleuré comme on dit par toute une nation comme le montre notre presse quotidienne.
Didier Dominique n’a occupé aucune fonction officielle et encore moins politique pourtant il est connu pour ses prises de position beaucoup plus que tous les acteurs de la scène nationale - cela pour son mariage de l’engagement total et du non-conformisme également total.
Toujours au-devant de l’action, qu’elle soit politique mais sans affiliation connue, ou syndicale mais avec un jusqu’auboutisme qui peut rebuter les chefs syndicaux eux-mêmes, donc pas très pratique mais excellent enseignant à la Fac des sciences humaines puisque comme on dit la parole est libre mais la plume est serve … Il a cependant écrit un livre (‘Savalou E’), avec sa regrettée … Rachel Beauvoir, fille de Max Gesner Beauvoir et qui succédera à ce dernier à la tête du célèbre Péristyle de Mariani.
Rachèle nous a laissé le 5 janvier 2018.
Qui l’eut crû ? Didier Dominique en dignitaire vodou et présidant aux cérémonies dans le plus grand temple vodou de la capitale haïtienne, les ancêtres doivent se retourner dans leur tombe.
Didier Dominique est en effet le dernier né de Henry et Maude Dominique, une mère catholique fervente et dont l’un des nombreux fils n’est autre que Père Max Dominique, mort lui aussi d’un cancer.
Mais Didier est un non-conformiste né.
Petit dernier, il fut donc la consolation de grand-père Dominique, ex-doyen de la Faculté de médecine de Port-au-Prince et ambassadeur dans plusieurs pays d’Europe. Lorsque toute la famille était attablée le dimanche, le petit Didier s’amusait à jouer des vilains tours à tout le monde mais à la grande joie de ‘Grand-pa’.
Cet esprit frondeur va marquer toute sa vie comme on vient de voir. Etudes universitaires à Porto Rico chez un oncle qui avait fui la dictature Duvalier, là il rencontra Maryse Pénette, ils eurent une fille Arielle puis c’est le divorce sans raison apparente mais comme on dit par consentement mutuel …
Je le sais parce que cela s’est passé chez nous à la ruelle Roy avec pour témoins mon épouse Jocelyne Dominique et moi.
Arielle grandira avec notre fille Sarajini et sous la protection de ma belle-mère, l’aussi douce qu’infatigable Nande (Fernande Dominique) secondée de son inséparable, imparable cuisinière Nadine pour laquelle Didier et sa future compagne Rachel, eux aussi des fins gourmets, ne manqueront pas de petits cadeaux à chaque visite.
Cependant notre Didier est très instable comme on dit dans la bonne société chez nous.
A tel point qu’il tentera à un moment de se suicider. Je suis à Miami exilé à mon tour par la dictature et c’est chez nous qu’il atterrira.
Mais soudain tout change. Il a rencontré Rachel Beauvoir.
Eureka ! C’est le chemin de Damas en version … vodou.
Didier embarque avec sa nouvelle épouse et son beau-père pour une tournée dans des pays d’Afrique et du Moyen-Orient.
Rachel est ethnologue par surcroit.
En Haïti le couple est infatigable : cours à la fac des sciences humaines mais également recherches sur les religions dans l’Histoire d’Haïti. Des Tainos aux catacombes sous l’ancienne Cathédrale de Port-au-Prince, cela agrémenté de discussions furieuses avec son beau-frère et architecte émérite Jacques Brun celui-ci expliquant qu’il ne saurait y avoir de catacombes sinon sous les églises remontant au Moyen-Âge etc.
En même temps Didier aura une émission sur notre nouvelle radio Mélodie FM à Port-au-Prince, créée en collaboration avec Elsie Ethéart, mais sur laquelle je dois garder un œil ouvert vu le côté plutôt anarchiste de mon cousin par alliance, une attitude qui bien entendu ne plaira pas beaucoup à ses invités les étudiants de la Fac des sciences humaines qui débarquaient en trop grand nombre à la station.
Puis c’est le coup fatal …
Le séisme du 12 janvier 2010. Didier est accouru chez nous ventre à terre et il était à mes côtés quand on a sorti mon épouse des décombres de notre maison à la Ruelle Roy, trop tard elle nous a laissé !
MIAMI, 16 Mai – Où est la bourgeoisie? On voit le peuple se dresser un peu partout contre les gangs. A Port-au-Prince cela commençant dans le quartier du Canapé vert (classe moyenne), pour se poursuivre dans la montagne à Furcy, Kenscoff où beaucoup perdent la vie mais sans faillir ; pareil dans le département de l’Artibonite devant des bandes encore plus enragées et depuis toujours pays des ‘zobob’ comme on avait appris dans notre enfance …
Mais aucune trace de nos ‘riches’ pour employer un mot simple si ce n’est simplet … Sinon que pour se plaindre dans les médias.
En effet que de résidences dévalisées puis incendiées. Jusqu’aux trésors architecturaux de la capitale remontant aux temps anciens de Tonton Nord ou Tonton Lyle, voire aux temps ‘bimbo’ … D’où sortent donc ces sauvages, qu’on les fusille !
Justement parce que jusqu’à présent il y a toujours eu l’armée pour accomplir cette tâche. Sous le président-général Paul E. Magloire (1950-1956), la pire insulte était : espèce de civil !
Le revers de la médaille c’est aussi que dès qu’une situation comme celle d’aujourd’hui se présente, le riche est suspect.
‘Sispèk sispèk !’
Est-ce même de sa part un nouveau complot pour s’emparer du pouvoir ? Ainsi que de la fortune nationale ?
Or aujourd’hui, barre à tribord toute, les gangs ne font pas dans la dentelle et tous y passent. Les pauvres chassés et forcés de se réfugier dans des abris de fortune tandis que les riches voient leur seule fortune, le produit de tous leurs investissements, partir en fumée.
Cependant malgré tout cela, ces derniers jusqu’à présent ne bougent pas.
Les riches ne savent plus se battre !
Ils ne peuvent rien faire, ils ne savent quoi faire … sans l’Armée ?
Ou sans plus tard les Tontons macoutes sous Papa Doc ?
Or c’est justement ce qui fait la différence entre les événements actuels et tout ce que notre pays a vécu jusqu’ici …
Haïti menacée de perdre son indépendance même, comme tous le disent, comme on pressent, alors si c’est ce que nous craignons vraiment que faut-il faire ? Si ce n’est refaire comme on avait fait pour gagner cette même indépendance et cette indépendance même ?
Lire la suite : L’Etat, le Peuple et la Bourgeoisie (Manno Charlemagne)
Un nouveau Pape avec peut-être du sang africain
Selon le New York Times, le nouveau pape Leon XIV, intronisé jeudi, a des liens avec la culture Afro-caribéenne par sa famille qui a compris des membres appartenant à la population noire ou mulâtre (métis) de la Nouvelle Orléans (Louisiane).
Les grands-parents maternels du nouveau pape né Robert Francis Prevost, lui-même né à Chicago – ont vécu dans la ville de Seventh Ward, dont la population est majoritairement catholique, et avec un mélange de racines Africaines, Caribéennes et Européennes.
Les grands-parents Joseph Martinez et Louise Baquié, ont éventuellement gagné Chicago au début du 20e siècle où ils ont donné naissance à une fille, Mildred Martinez, qui est la mère du nouveau pape.
Aussi, conclut l’article du New York Times, Leon XIV n’est pas seulement le premier souverain pontife d’origine américaine mais il est aussi à un carrefour généalogique comprenant les différents éléments qui composent l’histoire véritable de ce pays.
Nous ajouterions, c’est l’Histoire aussi de notre Haïti. Avec en effet des noms comme Joseph Gérard et Louise Ernestine et Paul Agnès figurant encore sur le tombeau des grands parents de Léon XIV à Chicago.
EDITORIAL
NECESSITE POUR UNE CAMPAGNE DE DESARMEMENT
Au risque d’un immense Pè Lebren !
MIAMI, 5 Mai – Au lendemain de la reconnaissance par les Etats-Unis des gangs haïtiens comme ‘organisations terroristes étrangères’, disons au même titre que les Al-Qaeda, Boko Haram et consorts, le conseil de gouvernement haïtien (CPT) annonce avoir adopté un budget de guerre … mais il manque une chose à ce budget : une campagne de désarmement des gangs car c’est aussi le moment ou jamais.
Dépêche de RHINEWS, « Le CPT a ratifié un budget de guerre pour éradiquer les bandits nationaux et leurs alliés de la mafia internationale qui sèment le désordre dans le pays », soulignant que la crise actuelle repose sur une infrastructure de criminalité transnationale, impliquant trafic de drogue, d’armes, de munitions, d’organes, blanchiment d’argent, et autres activités illicites.
Mais peu de précisions concernant les détails de ce budget ni sur les appropriations, on dirait que c’est surtout pour abonder dans le mouvement soulevé par la décision de Washington déclarant les Viv Ansanm, Gran Grif et autres non grata international ouvrant la voie à leur élimination par tous les moyens possibles, tant nationalement qu’internationalement.
Reprenons le problème à zéro !
MIAMI, 29 Avril – Première image. Nous engageons notre vieille camionnette sur la route de montagne qui traverse aujourd’hui le territoire sous occupation par le chef de gang surnommé Krisla afin d’éviter le tohu-bohu de la route nationale cela jusqu’à la commune de Carrefour, porte d’entrée dans la partie sud du pays …
Que voyons-nous ?
C’est une véritable armée de gosses, presque nus, dégringolant des hauteurs, et qui se précipitent vers nous la main tendue.
Image frappante.
Autant de fillettes que de garçons, mais difficiles à distinguer les uns des autres tellement ils sont nombreux et tous pareils.
MIAMI, 16 Avril – On est au début des années 1980 et celui qu’on appelait lors le boat people haïtien remporta une grande victoire au tribunal sur le gouvernement fédéral américain.
L’avocat qui dirigea aussi brillamment ce procès s’appelle Ira J. Kurzban, allié au Centre des réfugiés haïtiens de Miami de regrettée mémoire comme on dit.
L’argument du gouvernement américain : ces haïtiens ont violé la loi qui interdit de traverser illégalement la mer pour entrer aux Etats-Unis.
L’argument de Me. Kurzban : ils n’étaient pas au courant d’une telle loi, comment pourraient-ils alors la violer ?
Voilà !
Pendant que le gouvernement Reagan dut lancer une grande campagne publicitaire dans l’Haïti de Baby Doc toujours au pouvoir à l’époque : « Allo allo, si vous prenez la mer vous serez arrêtés et refoulés en Haïti », ce fut l’époque du vaisseau des gardes côtes américains nommé ‘Hamilton’ poursuivant partout les ‘pirogues’ de réfugiés ou ‘kantè’ etc.
Mais en retour le gouvernement américain perdit le procès et l’immigration américaine dut remettre en liberté plusieurs milliers de compatriotes qui étaient enfermés dans les camps de Krome Ave à Miami, Fort Allen (Porto Rico), à New York etc.
Aujourd’hui le même dossier migratoire, comprenant aussi des Haïtiens, revient devant les tribunaux aux Etats-unis.
« Une juge fédérale a empêché le lundi 14 avril l’administration du président américain, Donald Trump, de révoquer le statut légal de 532 000 immigrés cubains, haïtiens, vénézuéliens, nicaraguayens.
“La décision de la juge Indira Talwani, de Boston (Massachussetts), est la dernière ordonnance en date contre la volonté de M. Trump de procéder rapidement à des expulsions massives visant, en particulier, les Latino-Américains.