“l’Amérique se montre moins en gardienne de la paix qu’en puissance guerrière affirmant son rôle de force dominante” …
La Rédaction = 13 septembre 2025

Par Jean Venel Casséus
Le 5 septembre 2025, le président Donald Trump a décidé, à travers un décret présidentiel, d’autoriser officiellement l’appellation de « Département de la Guerre » comme nom secondaire du Département de la Défense. L’enjeu de ce changement est très significatif : il marque un tournant symbolique et conceptuel dans la manière dont les États-Unis conçoivent leur rapport au monde.
Depuis 1949, l’appellation Department of Defense s’inscrivait dans une logique de protection et de légitimation morale : l’armée américaine se présentait comme une force au service de la sécurité nationale et internationale, protectrice des alliés et garante de l’ordre global. Le retour au terme War Department, utilisé jusqu’en 1947, rompt avec cette rhétorique. Il place la guerre, et non la défense, au cœur de l’identité institutionnelle de l’armée américaine.
Conceptuellement, la différence est majeure. Le mot défense suggère la riposte face à une menace, la réaction à un danger. Le mot guerre, lui, affirme une offensive assumée, une volonté d’affronter, de désigner l’ennemi et de le combattre. Dans un monde marqué par la polarisation, la compétition des empires et la résurgence des logiques de blocs, ce choix lexical traduit un repositionnement idéologique : l’Amérique se montre moins en gardienne de la paix qu’en puissance guerrière affirmant son rôle de force dominante.
Historiquement, la guerre a toujours été présente dans la politique étrangère américaine, mais elle était enveloppée de discours humanitaires ou sécuritaires. Désormais, le voile tombe. L’État se présente frontalement comme une machine de guerre.
Sur le plan géopolitique, ce changement de nom secondaire aura des répercussions. Pour les alliés, il peut susciter un malaise : parler de guerre envoie un signal plus brutal, moins diplomatique, qui tranche avec la rhétorique de sécurité collective. Pour les adversaires, c’est un aveu de franchise, mais aussi une démonstration d’agressivité. À l’intérieur, la culture militaire américaine pourrait se renforcer autour d’un ethos du guerrier, avec une opinion publique davantage habituée à l’idée d’un conflit permanent.
En définitive, ce décret présidentiel exprime une recomposition de l’imaginaire national, un tournant rhétorique qui pourrait annoncer un tournant stratégique. De protecteurs, les États-Unis se définissent désormais comme combattants.