PORT-AU-PRINCE, samedi 4 octobre 2025 (RHINEWS) – Le Programme alimentaire mondial (PAM) des Nations unies a tiré la sonnette d’alarme jeudi sur l’aggravation de la crise alimentaire en Haïti, où la violence des groupes armés paralyse la capitale et empêche l’accès humanitaire, tandis que le manque de financements contraint l’agence à réduire drastiquement ses opérations.
Selon les données présentées, près de 90 % de Port-au-Prince est aujourd’hui sous contrôle des groupes armés. « La violence a consumé chaque recoin de la capitale, aucun quartier n’est épargné, et les zones rurales autrefois paisibles sont désormais touchées », a déclaré Wanja Kaaria, directrice et représentante du PAM en Haïti. Cette situation isole les agriculteurs des marchés, fragilise davantage les circuits d’approvisionnement et entraîne une flambée des prix alimentaires.
Le PAM indique que 1,3 million de personnes ont été contraintes de fuir leur foyer à la recherche de nourriture et d’abris. Des milliers de familles survivent entassées dans des écoles et des bâtiments publics, privées de revenus et d’accès à l’éducation. Plus de la moitié des déplacés sont des enfants, ce qui contribue à une hausse alarmante des cas de malnutrition dans les quartiers de la capitale dépourvus de services de base.
Faute de financements, l’agence a suspendu la distribution de repas chauds aux nouveaux déplacés et réduit de moitié les rations alimentaires. Pour la première fois, le PAM n’a pas pu prépositionner de stocks pour répondre à un éventuel désastre naturel en pleine saison cyclonique. « Aujourd’hui, plus de la moitié des Haïtiens n’ont pas assez à manger. Avec le niveau actuel des financements, nous peinons à empêcher la famine de s’installer », a averti Mme Kaaria, soulignant que « des enfants, des mères, des familles entières perdent espoir ».
Le PAM rappelle que la récente adoption par le Conseil de sécurité de l’ONU d’une résolution créant une force multinationale renforcée pour Haïti constitue « un pas critique et bienvenu » vers la stabilité, mais insiste sur le fait que « les efforts de sécurité doivent aller de pair avec des investissements humanitaires et de développement accrus pour éviter un effondrement social encore plus large ».
Depuis janvier 2025, malgré l’insécurité extrême, le PAM affirme avoir apporté une assistance vitale à plus de 2 millions de personnes. Le programme poursuit également des initiatives de long terme, telles que les repas scolaires pour 600 000 élèves haïtiens, dont 70 % préparés avec des produits locaux, soutenant ainsi les agriculteurs et les fournisseurs haïtiens. L’organisation mène aussi des projets d’infrastructures communautaires, y compris dans des zones contrôlées par les gangs, pour restaurer les systèmes d’irrigation et relancer la production agricole.
Haïti demeure le seul pays du continent américain confronté à des niveaux de faim catastrophiques (IPC5), équivalents à des conditions de famine. Avec 5,7 millions de personnes en insécurité alimentaire aiguë, le pays fait partie des cinq crises alimentaires les plus sévères du monde.
« Haïti est à un moment crucial. Nous appelons les partenaires internationaux à renforcer leur soutien afin de fournir non seulement une assistance d’urgence vitale, mais aussi des programmes capables de s’attaquer aux causes profondes de la faim et de redonner espoir », a insisté Mme Kaaria. Le PAM estime avoir besoin de 139 millions de dollars américains pour les douze prochains mois afin de venir en aide aux familles les plus vulnérables.
L’organisation avertit que ces manques de ressources menacent non seulement des vies, mais également la stabilité nationale et régionale. « L’aide alimentaire est un filet de sécurité essentiel dans cet environnement explosif : elle sauve des vies aujourd’hui, mais elle réduit aussi le risque d’effondrement social, de déplacements massifs et de migrations forcées demain », conclut le PAM.
L’article original a été publié initialement en anglais sur: https://www.wfp.org/news/haiti-brink-violence-cuts-capital-pushing-families-towards-starvation-amidst-cuts-humanitarian