MEYER, 27 Septembre – Haïti a beaucoup évolué, quoi qu’on dise. Un président de la république peut s’absenter pendant plusieurs jours sans risquer le moindre soubresaut. Qui plus est, son premier ministre l’accompagne, laissant le pays aux mains d’aucun responsable en particulier, que tout est tranquille. Pas un pétard. Plus rien ne bouge. Et ce n’est pas qu’il n’y ait pas de mécontents. Ceux-ci font un boucan, sur les ondes. Mais c’est tout. Tout se passe bien.
Du jamais vu en Haïti !
Les absences présidentielles ont toujours été le moment idéal pour faire mariner les complots. Aussi les présidents haïtiens ont toujours été de grands casaniers. L’exemple le plus typique reste les Duvalier père et fils. Il est vrai que du haut de leur présidence à vie, ils ne laissaient aucune autre alternative.
Le seul voyage de Baby Doc a été de gagner l’exil (1986).
Et son second voyage a été de retourner en Haïti (2011) dont il n’est plus reparti depuis. C’est atavique.
L’exemple contraire c’est Jean-Bertrand Aristide. Dès qu’il bougeait, le renversement se rapprochait.
Pas étonnant qu’il ait deux fois été basculé (en 1991 et 2004) avant la fin de son mandat.
Aussi qu’est-ce qui a changé ?
Lire la suite : Quand nos présidents peuvent voyager sans peur ni reproche !
PORT-AU-PRINCE, 17 Octobre – 208 ans après l’assassinat du fondateur de la patrie, le Général Jean-Jacques Dessalines (tué au Pont Rouge, entrée nord de Port-au-Prince, le 17 octobre 1806, dans une embuscade tendue par des adversaires politiques), nous continuons à nous en accuser les uns les autres.
Samedi dernier, 17 octobre, deux groupes sont descendus dans les rues pour faire entendre leur credo politique réciproque.
Pour nous résumer, le pouvoir en place d’un côté, et l’opposition de l’autre.
Pour nous résumer encore plus, mais d’une manière caricaturale, l’opposition se décrit comme des héritiers du Libérateur et premier chef d’Etat d’Haïti, l’Empereur Jean-Jacques Dessalines, le général en chef de nos célèbres va-nu-pieds qui ont vaincu, le 18 novembre 1803, la force expéditionnaire envoyée par Napoléon Bonaparte pour les remettre en esclavage.
Et à entendre un discours qui se développe depuis l’arrivée au pouvoir, en 2011, du président Michel Martelly (dans le privé, artiste de variété) : le pouvoir actuel est l’émanation de la minorité ‘zuit’ (traduisez : toute petite) qui détient la quasi totalité des richesses matérielles du pays depuis toujours.
Vrai ou faux, ce qui sort de l’ordinaire c’est la nouvelle qualification donnée à ces derniers : ‘Pitit Petyon’ (fils de Pétion).
PORT-AU-PRINCE, 23 Octobre – Un dilemme total. Comment en est-on arrivé à payer la gazoline plus cher alors que ses prix sur le marché international sont au plus bas ?
Le gouvernement haïtien a augmenté en effet les prix du carburant à la pompe, la gazoline devant connaître d'ici à mars 2015 une hausse d'environ 25%, le diesel et le gasoil presque idem.
Or cela n'a rien à voir avec les tarifs internationaux. Comme tout produit importé, le coût de la gazoline monte ou descend conformément à son appréciation sur le marché international.
Le gouvernement haïtien prend la précaution de nous expliquer que ce n'est pas en rapport avec les tarifs internationaux qu'ont lieu les nouvelles augmentations mais c'est parce que l'Etat haïtien n'est plus en mesure de consentir la subvention qu'il accordait jusqu'ici au secteur du pétrole.
Mais comme explication c'est un peu court. Car pourquoi la subvention n'est-elle plus possible aujourd'hui ?
La réponse est plus compliquée et semble provenir d'une série de malentendus dont tous ne relèvent pas directement de notre volonté en Haïti.
Si tout a été tranquille pendant les dix dernières années sur le front de la gazoline en Haïti, c'est grâce à un certain accord signé avec le plus grand exportateur mondial de fuel et qui n'est autre que notre voisin, le Venezuela.
Et cet accord s'appelle bien entendu Petrocaribe.
Petrocaribe nous fournit non seulement la gazoline sur une base régulière et constante et à un prix avantageux, mais aussi met à notre disposition une ligne de crédit qui a permis à l'Etat haïtien d'entreprendre un grand nombre de travaux d'infrastructures : routes et ponts, centrales électriques etc.
De 2006, date de la signature de l'accord par le président René Préval à date, non seulement nous n'avons jamais manqué de carburant comme c'était autrefois tout le temps le cas, mais les prix à la pompe sont restés fixes.
PORT-AU-PRINCE, 30 Octobre – On se bat sans parvenir à tenir les législatives et municipales qui sont en retard depuis trois ans, or les présidentielles sont déjà d’actualité.
Ces dernières doivent avoir lieu l’an prochain, en automne ou décembre 2015.
Dans le brouhaha des démarches entreprises, nationalement et internationalement, pour tenter de convaincre les belligérants, particulièrement l’Exécutif et le Sénat de la République (ce dernier devenu la place forte de l’opposition au pouvoir en place), voici que des petites phrases assassines partent ici et là qui commencent à nous introduire à la prochaine étape : la bataille présidentielle.
C’est Fanmi Lavalas, en pleine conférence de presse, accusant le notaire Jean Henry Céant d’utiliser le nom de l’organisation politique sans autorisation.
‘Si une personne n’est pas membre du parti, il ne peut s’arroger le droit d’organiser aucune activité au nom de Fanmi Lavalas’ a déclaré Louis Gérald Gilles, un des ténors du parti de l’ex-président Jean-Bertrand Aristide.
On sait que Jean Henry Céant, candidat malheureux aux présidentielles de 2010-2011, a annoncé son intention de concourir à nouveau pour la présidence de la République en 2015.
On sait aussi que la famille Céant a été très proche de l’ex-président Aristide. Jean Henry Céant aurait aussi été jusqu’à récemment le notaire en titre du citoyen Jean-Bertrand Aristide.
JACMEL, 9 Novembre - Des inondations ont frappé le pays durant le week-end de la Toussaint (1er-2 Novembre) provoquant environ 12 morts dans le seul département du Nord, particulièrement dans le chef-lieu, Cap-Haïtien, et les commune avoisinantes.
Deux jours plus tard, le président Michel Martelly et le premier ministre Laurent Lamothe étaient sur place.
On a procédé à une large distribution de kits alimentaires et le gouvernement a annoncé des fonds de l’ordre de 34 millions de gourdes pour faire face aux conséquences des intempéries. C’est vraiment peu.
Le ministre de l’Intérieur et des collectivités territoriales et la DPC (Direction de la Protection Civile) ont assuré la gestion desdites urgences.
Cependant dans ce département comme ailleurs dans le pays, l’appellation de catastrophes naturelles n’est qu’une formule, ces déboires sont bien plus la conséquence de la gestion de son environnement par l’homme haïtien.
Outre les travaux d’infrastructures jamais accomplis ou restés depuis longtemps en suspens.
La montagne a accouché d’une souris …
On est étonné que les chefs de l’exécutif ni les autorités locales et départementales n’en aient fait cette fois aucune mention dans leurs déclarations ou dans les communiqués officiels.
Pas étonnant quand le chef de l’Etat se fait accompagner de son ministre à la communication (autrement dit la propagande) et que sont absents les véritables concernés : en premier lieu, les titulaires des travaux publics, de l’environnement, de l’agriculture.
Ensuite, le pouvoir central doit être obligatoirement suppléé par les autorités sur le terrain.
Par conséquent, la montagne a accouché d’une souris. La visite de solidarité aux populations affectées annoncée par le pouvoir, et en la personne du président et du premier ministre en personne, consistera en tout et pour tout en une distribution de ‘manger sinistré’ mais les problèmes sérieux, ceux qui sont à la base de la faiblesse des infrastructures occasionnant ces débordements dans la deuxième ville du pays, accompagnés d’inondations et d’éboulements qui font plus d’une dizaine de morts, sont passés inaperçus.